Perspectivia

Mon tres cher Frere

[… ]Vous avez bien de la bonté[,] mon cher Frere[,] de vous souvenir de moi. Les Ananas que vous m’avez fait la grace de m’envoyer en sont une preuve[.] Vous pouvez vous vanter d’avoir de beaucoup meilleurs | Fruits que ceux d’Jtalie. Les Raisins n’aprochent point de ceux de Sanssouçi, et meme les Anguris sont meilleurs et ont plus de gout. Aussi est ce vous qui les cultivez, ils ne peuvent manquer de reussir. […] | [… ]Nous somes a la veille de faire une perte ireparable. Le Col[onel]: Bonin se meurt. C’etoit un bien honnet hom[m]e qui a rendu de grands services au Marg[rave]: tant pour le Militaire que pour la Police. Jl envisage la mort avec une fermeté Heroïque, et employe le tems que les douleurs lui laissent du relache a expedier encore ses affaires. Ce sont toujours les bons sujets qui meurent. Tandis que les Sots et les mechants restent au monde pour le tourment du genre [des gens ]humain. Pardonez[,] je vous suplie[,] mon cher Frere[,] la Confusion de cette Lettre. Mes yeux sont devenus si foibles que je suis pour mon | malheur presque hors d’etat de m’apliquer a la moindre chose, et que je suis obligée d’ecrire a Batons rompus. J’ai contracté cette [n… ][ou ][r… ]nouvelle Jnfirmité a Avignon. Depuis mon retour elle empire. ce qui me rend souvent de fort mauvaise humeur. Je me recomende encore a votre precieux Souvenir et suis avec tout le respect et la tendresse Jmaginable[,]

Mon tres cher Frere[,]
Votre tres humble obeïssante Soeur et Servante
Wilhelmine

Bareit Le 14 de Nov[embre] 1755