Correspondance de Wilhelmine de Prusse

Mon tres cher Frere

On diroit que la Provence a changée de Situation et qu[’]elle soit transportée en Siberie. Je n’ai jamais passé d’hiver pareill a cellui ci. Ma Santé en souffre[,] ce qui m[’]a empecheé de pouvoir écrire. Le tems s’etant un peu remis au beau depuis avant hier, j’en ai profité pour venir ici, Le repos continuell achevant de ruiner ma santé. J’ai profité de la [on][? ]petite trêve que nous donnoit Borrée pour voir les Anthiquitez. L’Arc de Triomphe de Marius es^ttrés Beau. Une des Principales Facade est assez bien Consservée. Jl est d’Ordre Corinthien le [et ]hauteur est pareille au Chateau de Berlin[,] | il y a plusieurs Bas relieffs represantent les 2 Battailles gagnée par Marius sur les Teutons [… t]et les Battaves, Les autres representent des Trophées et des Jnstruments de Sacriffices. Le tout[,] a ce qui me paroit[,] est trop chargé. Les Arenes sont si endomagées qu’on n’y reconnoit plus rien[.] il n’y a qu’un pan du Mur exterieur qui subssiste par lequel on peut juger de la hauteur et de la Majesté de cett Edifficice[ édifice]. Dans deux ou 3 ans d’ici on ne vera plus rien de L’arc de Triomphe. La voute menace ruine[;] on pouroit La raccomodé avec peu de peine[,] mais on n’en fera rien. La Ville est fort Laide[,] il y a une quantité prodigieuse de Protestants qui se font apeller Prussiens. Dans peu[,] mon cher Frere[,] vous en auré la plus grande partie. Jls ne penssent qu’a quiter | et n’ont pas fait mistere avec moi. Les Tailles et les Jmpots sont tells qu[’]ils jouïssent […ant ]a peine d’un tier de leur revenu. La Brouillerie du Roi avec le Clergé a un peu tranquilisé les esprits[,] mais ceux qui conoissent le gouvernement pronostiquent que le Parlement s’emparera de toute L’autorité. Si la Cour ne tache a se faire respecter. On craint egalement les deux adverssaires. J’attendrai ici le retour du Marg[rave]: que j’attends aujourd[’]hui ou demain[.] Je me recom[m]ende encore a votre precieux Souvenir et suis avec tout le respect Jmaginable[,]

Mon tres cher Frere[,]
Votre tres humble obeïssante Soeur et servante
Wilhelmine

Orange Le 20 de Fev[rier] 1755